Vieux d’un peu plus d’un demi-siècle, le lycée Béhanzin incarne une part importante de l’histoire contemporaine de Dalaba. Il a été créé en 1960. À l’époque, il comptait 6 salles de classe pour un effectif d’une centaine d’élèves. Depuis, ce temple du savoir a accueilli des millions de jeunes élèves de Dalaba et d’ailleurs avides de science, mais aussi en quête d’un complément de savoir-être et de savoir-vivre. Cependant, cet établissement scolaire est aujourd’hui quasiment en ruine. Il abrite toujours des élèves ; mais, il a énormément perdu de sa notoriété et de sa splendeur. Certains observateurs le comparent actuellement à un « poulailler » pour ainsi désigner son état de dégradation très poussé. D’autres encore l’assimilent carrément à une « prison » pour mettre en exergue son manque d’espace vital pour l’épanouissement des élèves et du personnel enseignant. Aujourd’hui, tout le monde à Dalaba (autorités, enseignants, élèves, anciens élèves de ce lycée, sages…) plaide pour la rénovation et l’extension de cet établissement scolaire, a constaté Guineematin.com à travers une de ses équipes de reportage.
Dans ses premières heures, le lycée Béhanzin était un prolongement du lycée de Labé. A l’époque, il portait le nom de « lycée annexe ». Le Cardinal Robert Sarah fait partie de la première promotion que ce temple du savoir a accueilli et formé. Elhadj Ibrahima Bah, professeur à la retraite, Historien-Chercheur et secrétaire préfectoral adjoint des affaires religieuses de Dalaba, a également fréquenté cet établissement en tant qu’élève, mais aussi en tant que professeur chargé de cours d’histoire et d’éducation civique.
Actuellement, le lycée Béhanzin compte 384 élèves (dont 187 filles) encadrés par 21 enseignants dont une femme. Mais, cet établissement se trouve dans un état de dégradation très poussé. Il n’offre aucune commodité pour un enseignement-apprentissage de qualité et ne dispose d’aucun espace vital pour l’épanouissement des élèves et des enseignants. Pendant la saison des pluies (comme c’est le cas actuellement) le toit de cette école devient une véritable passoire. L’eau suinte de tous les côtés dans les classes et même dans le bureau du proviseur. La situation de cette école, à la fois alarmante et exaspérante, saisit l’œil du visiteur au premier contact. Le mât, dressé à l’extérieur, se trouve à quelques mètres de l’entrée principale du lycée. Une petite porte métallique mène à l’intérieur de la cour. Une cour formée de deux bâtiments abritant chacun cinq salles de classe. Ces bâtiments sont séparés par un étroit couloir où se bousculent élèves et enseignants pendant la récréation. Quand on franchit la porte de la cour, juste à gauche, se trouve une salle de classe qui sert de bureau au proviseur et de logement au gardien de l’école. A l’intérieur de cette salle, le constat est désolant. Deux étagères contenant des manuels scolaires, un tableau d’honneur en hommage à certains enseignants de ce lycée, quelques tables et des chaises décorent cette pièce dépourvue de plafond.
C’est une charpente abimée, des tôles rouillées et des gouttières défectueuses qui coiffent les salles de classe. Et quand il pleut, les élèves sont obligés de déambuler de part et d’autre dans les classes pour éviter que leurs effets soient mouillés par l’eau qui suinte abondamment du toit. Parfois, cela entraîne une interruption momentanée des cours.
« Une école qui ressemble à une Prison »
La situation du lycée Béhanzin est une grande préoccupation pour tous les habitants de Dalaba. Les problèmes qui assaillent ce lycée étaient récemment au cœur d’une réunion des parents d’élèves. Cette réunion avait été organisée par l’APEAE qui souhaite aujourd’hui la construction d’un « lycée moderne répondant à toutes les normes de commodités » à Dalaba.
« Nous (l’APEAE) venons de tenir une assemblée générale avec tous les parents d’élèves pour parler des difficultés auxquelles ce lycée est confronté. Parce que les problèmes sont nombreux. Il n’y a pas de tables-bancs pour les élèves de la 11ème Année, et il y a un manque d’enseignants. Cet établissement est très vieux. Cette école ressemble aujourd’hui à une prison qui abrite des personnes malpropres. En tout cas, cet établissement n’a rien d’une école. Vous avez vu ce petit couloir, c’est ici que les élèves et les enseignants se bousculent pendant la récréation. Il n’y a pas d’espace vital nécessaire ici. Nous souhaitons qu’on nous construise un nouveau lycée où les enfants (les élèves) peuvent s’épanouir parce qu’ils s’ennuient dans cette école. Et c’est difficile d’apprendre dans ces conditions. Nous voulons avoir un grand lycée dans un endroit spacieux qui permet l’épanouissement des enfants. Un lycée digne de nom encourage toujours les enfants d’y venir pour étudier », a indiqué Abdoulaye Barry, trésorier de l’APEAE au lycée Béhanzin.

Actuellement à la retraite, Madame Aïssatou Diallo (plus connue sous le pseudonyme de Madame Géographie) a voué au lycée Béhanzin toute sa vie professionnelle. Elle y a travaillé de 1988 à 2023 (année à laquelle elle a fait valoir son droit à la retraite). De professeure chargée de cours, elle a gravi les échelons pour finir proviseure de cette école. Aujourd’hui, c’est avec un cœur meurtri que cette professionnelle de l’éducation observe ce lycée tomber en ruine. D’où son appel à l’aide de toutes les bonnes volontés pour la rénovation de cet inestimable établissement scolaire. Un appel qui abonde dans le même sens que le plaidoyer de monsieur Ibrahima Sory Dambi Baldé, l’actuel proviseur du lycée Béhanzin.

« Ce lycée est malade. Nous sommes dans un couloir. Et ce couloir aussi est très dégradé, vous l’avez constaté. Ici, nous sommes dans un soi-disant bureau, mais en réalité, c’est une salle de classe qui a été transformée en bureau. Cette salle fait office de bureau pour le proviseur et de logement pour le gardien. Et là aussi, quand il y a la pluie, quand je viens le matin, il faut que j’envoie des élèves pour nettoyer l’eau avant que je m’y installe. C’est la même chose au Censorat et dans les salles de classe. La toiture et les murs risquent de céder si on n’intervient pas rapidement. Les effectifs ne font qu’accroître, et si on ne fait pas attention, à un moment donné, il faudra qu’on étudie ici matin et soir. Le lycée est dans un état de dégradation très poussé. J’ai fait un plaidoyer pour qu’on aide à refaire la toiture. Mais ce qui est plus urgent ici, c’est de nous aider à avoir un lycée moderne. Mon souhait le plus ardent, c’est qu’on nous construise même un lycée moderne. Parce que l’espace est là, on a un hectare et demi ici, on a le plan de masse. Depuis 1960 cette école est là avec les mêmes bâtiments », a déploré Ibrahima Sory Dambi Baldé, proviseur du lycée Béhanzin.

A la retraite depuis 2012, Elhadj Thierno Habib Sow a consacré 27 ans de sa vie d’enseignant au lycée Béhanzin. Il y a fait ses études secondaires. Et pendant sa carrière professionnelle, il a assumé les fonctions de conseiller à l’orientation, puis directeur des études dans cet établissement. Aujourd’hui, il estime que la conception de la construction de ce lycée n’est plus adaptée à la réalité. Il l’assimile à une « écurie », en lieu et place d’une école. Une sensation partagée par Michel Dopavogui, élève de terminale sciences expérimentales au lycée Béhanzin.

« Notre lycée est en état de dégradation. Les toitures sont foutues, et cette école ne répond plus aux normes de qualité. Donc, je dirais à toutes les bonnes volontés de nous assister pour que nous ayons un lycée moderne. L’ONG Polgal nous vient souvent en aide pour entretenir cette école. Mais vous avez vu, dans les salles de classe, les élèves sont assis trois par table-banc. Nous sommes vraiment en manque de bancs. Et lors des grandes pluies, quand on vient à l’école, il faut perdre des heures de cours pour nettoyer l’eau qui stagne sur les terrasses et dans les salles de classe », a expliqué Michel Dopavogui.
À la direction préfectorale de l’éducation (DPE) de Dalaba, le lycée Béhanzin est un « souci majeur ». Il est le principal lycée de la préfecture et l’unique lycée public de la commune urbaine. Son état de dégradation est au centre des préoccupations des autorités éducatives locales.

« C’est un lycée qui n’a pas l’espace qui correspond à la norme actuelle. S’il y a 20 ans, 30 ans, 40 ans on pouvait admettre qu’un lycée soit dans cet état, il est impossible de penser ainsi en 2024. Parce que les conditions qu’il faut pour les élèves et les enseignants pour les cours n’y sont plus en termes d’infrastructures. Il n’y a pas d’espace pour les élèves et les salles de classe ne sont pas dans les normes. Cela fait que les élèves étudient dans des conditions très difficiles et les enseignants travaillent aussi dans des conditions très difficiles. Donc, vu le passé de ce lycée et le futur de cette préfecture, il est impératif que les initiatives au niveau de l’Etat et des ressortissants ou résidents aillent dans le sens de la rénovation ou même de la délocalisation, parce que ce lycée ressemble plutôt à une prison qu’à un établissement scolaire. Une école de nos jours doit abriter d’autres infrastructures socio-éducatives telles que les espaces de jeux, de sports, etc. Les effectifs sont en train d’évoluer, et on risque d’avoir à faire de l’alternance : un groupe le matin, un groupe le soir. Et tout le monde sait les implications sur le plan de la gestion du personnel que cela va amener. C’est vrai qu’il y a des démarches en cours, mais le plus tôt sera le mieux. Mais, c’est vrai un SOS pour le lycée Béhanzin », a dit Ibrahima Diakité, directeur préfectoral de l’éducation de Dalaba.
De retour de Dalaba, Mamadou Baïlo Keïta, Thierno Hamidou Barry et Saïdou Hady Diallo pour Guineematin.com
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